Récemment, nous étions assis tranquillement à réfléchir sur ce que nous pourrions écrire dans notre prochain message. La routine est bien installée. Pas d'anecdotes croustillantes, pas d'incidents majeurs, des rencontres interessantes certes, mais aucun évènement spécial n'émergeait.
Alors, pourquoi ne pas vous amener avec nous pour une promenade au bazaar (marché en népalais), tout simplement. Quoique ...cette balade quotidienne banale peut devenir une aventure ! Surtout, quand on s'arrête pour prendre des photos !
Premier arrêt: le long de la route des marchands de fortune. Vous aurez compris que le sens du mot fortune ici n'équivaut en rien au mot fric. Ce sont plutôt, aux dire de mes collègues, des cabanes en boue et en bamboo illégales. Ils n'ont aucun titre de propriété. Les autorités les tolèrent depuis de nombreuses années.
Dès que nous arrêtons, la course démarre. Quelques secondes après, des dizaines d'enfants curieux s'agglutinent autour de ce bidule roulant qui vient de l'espace avec ses deux extra-terrestes à son bord. Si nous arrêtons plus que 4-5 minutes, nous devenons un danger public pour la route qui se bouchonne sans délai malgré les klaxons qui retentissent.
Malgré cette route quotidienne que nous empruntons, notre passage semble provoqué une onde de choc à chaque fois. Les doigts nous pointent, des sourires s'esquissent, un cou de coude par ci, un chuchotement par là. Cela fait presque deux mois que nous empruntons cette même route. Nous sidérons toujours ces mêmes spectacteurs.
Il faut se rendre à l'évidence, nous sommes une attraction divertissante. D'ailleurs, Emma ne me demande plus pourquoi ces gens la dévisage autant. Elle sait qu'elle représente la minorité visible.
Plus on s'approche du marché, plus on risque de croiser des connaissances. Voici le proprio du dépanneur d'à côté de chez nous. Annik vous le présentera plus en détail dans un autre message. Il revient de son premier cycle d'approvisionnement au marché. Il refera les courses trois autres fois aujourd'hui, trois autres aller-retour.
Ici, nous entrons dans la section des vendeurs spécialisés en légumes. C'est le quartier des détaillants et grossistes. Les prix, la fraicheur et la variété sont un peu meilleurs.
Nous arrivons ensuite a la rue principale. C'est LA RUE pour trouver ce que tu as besoin autre que de la nourriture. Une genre de Ste-Catherine à Surkhet. Bars, bonne bouffe, marques et autres étalages de luxure en moins.
En parlant d'étalage, nous arrivons maintenant à notre épicerie. Oui, oui, nous appelons cette place notre épicerie. Véritable magasin général, cette grande surface vous offrira tout ce que Surkhet peut vous offrir, c'est à dire, pas grand chose, hihi. À partir du déodorant, jusqu'au sucre en passant par du beurre de peanut et des pâtes. Gros comme votre chambre, vous ne vous perdrez surement pas dans les allées à la recherche d'un article manquant ! Avantage concurrentiel majeur.
Vous remarquerez que j'ai utilisé le mot épicerie. Il faut quand même utiliser le concept de gradation pour comparer notre dépanneur avec cette épicerie. Vraiment, cette épicerie est la plus garnie dans tout Surkhet. Fait à ne point omettre ici: la ville compte entre 50 000 et 80 000 habitants.
Profession : épicier. Après une négociation pressante de notre part, ils ont accepté d'être nos fournisseurs exclusifs en ... lait UHT. Car parmi les denrées impossibles à trouver à Surkhet, le café et le lait se classent en haut de la liste. Oui, il y a du lait frais mais je vous ferai gouter à du lait de Buffalo non-pasteurisé pauvre et bourré de substances indésirables (merci Pierre) qu'il faut faire bouillir trois fois par jour. Vous me direz ce que vous en pensez. Les petits grumeaux qui restent pris dans les dents, ça fait son temps.
Il fallait sécuriser une source d'approvisionnement pour les enfants. Alors, il a fallu poussé sur leur sens des affaires. Les tirer par la racine un peu. Ils ont accepté de faire venir du lait AMUL. Un lait UHT qui ne nécessite d'être réfrigéré qu'une fois ouvert. Cependant, le parcours de ce lait (le seul disponible autre que le Buffalo milk, croyez-moi) nous donne de méchants remords de conscience. Produit en Inde, il est envoyé à Singapour pour être ensuite racheté par un distributeur népalais. Le carton de lait revient donc à Kathmandu avant de faire 16 hrs de route pour atterir à Surkhet !
Malgré son petit pif des affaires et sa gentillesse implacable, son seul défaut est qu'il planifie mal ses achats. Un mois sans lait, trois semaines avec. Convenir d'un approvisionnement stable avec son fournisseur demeure un apprentissage à venir.
Après quelques commissions chez notre épicier, nous descendons l'autre rue du marché. Remarquez les dalots sur le bord de la route. Ceux-ci se remplissent en quelques minutes lorsque la douche du Monsoon se met à tomber. Malheureusement, ces méga gouttières de rues sont souvent utilisées comme des poubelles à ciel ouvert.
Plus bas, les marchands de fruits nous attendent. Place à la négociation.
Même les vaches magasinent une fois de temps en temps. Chacun son tour SVP.
Tellement cute !
Les femmes aussi prennent une part active aux échanges commerciales de la rue.
La pose du grand frère (Dai).
Dernière destination : LE restaurant de Surkhet. Bienvenue au Namaste. L'hotel Namaste. L'hotel qui héberge les équipes du World Food Programme (WFP) de l'ONU. Une vingtaine de travailleurs y logent pour une période prolongée. En fait, ce sont surtout des russes qui travaillent sur les hélicoptères cargo du WFP. Ces équipes sont présentes à Surkhet depuis plus de deux ans et le seront encore pour quelques années selon ce que le flight manager nous a expliqué. Ils déservent toutes les régions inaccessibles en danger de famine de l'ouest du Népal à partir de Surkhet.
C'est pour cette raison que l'hotel a pu investir dans un espace de restauration avec des standards légèrement plus élevés, qu'ils servent des mets impossibles à trouver ailleurs à Surkhet tel des pizzas, des poulets BBQ et autres mets occidentaux. Bien sur, les mets népalais occupent une place de choix également. Bonus: les menus sont en anglais, ouf.
Arrivé au resto, c'est le temps d'enlever le casque de Naomi. À peine plus léger que sa tête.
Quand Alex (un autre coopérant du CECI qui avait passé quelques mois à Surkhet) nous avait parlé du Namaste, nous nous attendions à un restaurant vaste et propre. Propre oui, vaste, on repassera mais tant mieux, petite place tranquille. La convivialité y règne. Théo et Emma sont maintenant des habitués de la place. Tout le staff les accueillent à bras ouverts à chaque fois.
Emma, la grande soeur, qui s'occupe de sa petite soeur en attendant son mets.
Sur la route du retour, ce sont les espaces verts qui nous aident à digérer en nous accompagnant. Pour ça, nous sommes vraiment choyés. Les artères principales de Surkhet sont pour la plupart bordés d'arbres matures qui fournissent ombre et sérénité.
En fait, ce qui distingue Birendranagar (Surkhet) des autres villes du Népal, c'est que le roi affectionnait tout particulièrement cette vallée autrefois. Il a insisté pour qu'une planification urbaine soit executée. La planification n'étant pas la plus grande force des népalais de leur propre aveu, les résultats sont exemplaires. Des rues quadrillées, une zone industrielle, une zonne commerciale et surtout beaucoup d'espaces verts.
Comme ce parc à cinq minutes de notre maison ou Annik va jouer avec les enfants régulièrement.
Encore une fois, cette activité banale peut se transformer en aventure. Lorsque les blancs débarquent, la partie de soccer des locaux est suspendue. Il faut aller voir ces attractions venues d'un autre monde !